Vincent Denizot, alumni de l’ESCAET : un parcours d’agilité dans l’industrie du tourisme

Pour commencer, pourquoi avoir choisi de faire carrière dans le tourisme ?
Vincent Denizot : Il est souvent délicat d’identifier précisément ce qui influence le choix d'une carrière dans le tourisme. Dans mon cas, le fait que ma mère exerçait la profession d’agent de voyage a certainement eu une influence. Toutefois, l’élément décisif fut la découverte fortuite d’une affichette au format A4 dans les couloirs de l’IUT de Colmar, où j’effectuais alors un DUT Techniques de Commercialisation. Cette annonce présentait une formation proposée par l’ESCAET, suscitant chez moi une véritable révélation. Sans ce moment précis, il est probable que mon parcours aurait été radicalement différent.
Pouvez-vous nous présenter votre parcours en quelques grandes lignes ?
Vincent Denizot : J’ai tout d’abord choisi de suivre à l’ESCAET une formation courte d'un an spécialisée dans la distribution. À l’issue de cette année, j’ai débuté ma carrière professionnelle chez Havas Voyages, dans le cadre d’un partenariat établi avec l'école. Cependant, mon passage dans cette entreprise fut bref, puisqu’au bout de six mois seulement, j’ai rejoint Kuoni en tant que commercial. Cette nouvelle expérience, qui a duré six années, m’a notamment permis de réaliser un souhait personnel fort : revenir m’installer dans le Sud, une région à laquelle j’étais particulièrement attaché depuis mes années passées à l’ESCAET.
En 2002, j’ai accepté une mobilité géographique afin de saisir une nouvelle opportunité professionnelle : prendre la Direction Régionale Grand Est de Marmara. Dix ans plus tard, en 2012, Marmara a fusionné avec Nouvelles Frontières pour donner naissance à TUI France, entreprise dans laquelle j’exerce toujours aujourd’hui après 23 années de collaboration. J’y occupe actuellement le poste de directeur du Réseau de mandataires. Ma mission consiste à diriger les 204 agences de voyages affiliées au réseau TUI Mandataires, à définir les orientations stratégiques du réseau et à assurer son animation, son développement ainsi que l’amélioration continue de ses performances.
Quelle est votre plus grande fierté dans ce parcours ?
Vincent Denizot : Je vais être obligé d’en citer deux ! La première, c'est d'avoir développé une offre très importante dans l'Est de la France lorsque j'étais à la tête de la direction régionale de Marmara. Nous avons réussi à atteindre 150 000 clients par an dans cette région, sur trois aéroports, ce qui est un volume considérable. Ma deuxième fierté, c'est d'avoir réussi à transformer la relation entre TUI France et ses mandataires, d’avoir changé le mindset pour construire une vraie relation de confiance et de partenariat solide.
Quelles sont les compétences indispensables pour votre poste actuel ?
Vincent Denizot Côté hard skills, il faut une bonne connaissance de l'environnement et cette capacité à avoir une vision stratégique, à comprendre tous les enjeux et finalement, à manager.
Le monde change très vite, et il faut être capable de s'adapter, vite. Pour ce qui est des soft skills, l'agilité, l'écoute et le respect de l'autre sont essentiels. J'ai toujours essayé de construire la stratégie en fonction des remontées du terrain, car les distributeurs sont le reflet du client final. Et en même temps, il faut comprendre aussi les évolutions de notre industrie pour pouvoir ensuite convaincre le terrain et accompagner les mutations. Actuellement on entend beaucoup parler d’intelligence artificielle, nous sommes challengés sur ces sujets par le siège et c’est très bien. L’écoute mutuelle et la circulation de l’information sont indispensables dans les deux sens, l'un ne peut pas fonctionner sans l'autre en fait.
Quel conseil donneriez-vous à un jeune qui souhaite se lancer dans le tourisme aujourd'hui ?
Vincent Denizot : Il faut être curieux avant tout, avec une curiosité à 360°. Ceux qui ne sont pas curieux sont perdus. Le tourisme est un secteur qui évolue rapidement, il faut s'intéresser aux produits, aux destinations, mais aussi aux outils digitaux et ne pas avoir peur de s'investir ! Je pense que ceux qui ont envie de bosser, qui ont envie de se démarquer, pour peu qu’ils aient une tête bien faite et un peu de curiosité, ont un boulevard devant eux : ils sauront se démarquer bien plus vite que nous !
Quel souvenir gardez-vous de votre passage à l'ESCAET ?
Vincent Denizot : J'en ai beaucoup, mais celui qui ressort, c'est avant tout l'ambiance de la promo. Nous venions de toute la France, et nous ne voulions plus rentrer chez nous. Tous les week-end, nous partions à l'aventure, de Barcelonnette à Menton, je crois que nous avons tout quadrillé ! C'était une période extraordinaire. Et puis, il y a aussi ce moment où Jean-Maurice Thurot, le directeur de l'école, m'a confié les clés de l'école après une soirée de fin d'année en me disant : “Denizot, je te fais confiance, ce soir c’est toi qui fermeras l’ESCAET !”. Cela montre bien l'état d'esprit qui régnait à l'époque !
Vous avez évoqué les alumni avec ce petit groupe avec lequel vous êtes en lien. Pour vous, quelle est la force de ce réseau d'alumni ?
Vincent Denizot : Je pense que ça crée avant tout une histoire commune. Quand on se rencontre aujourd’hui et qu'on découvre que son interlocuteur est aussi un ou une ESCAET, ça crée tout de suite une proximité. Par exemple, je suis en contact régulier avec Didier Sylvestre, le directeur général adjoint d'Exotisme. Même si nous avons chacun nos propres enjeux professionnels, il y a toujours ce p’tit truc, ce tronc commun finalement qu’est l'ESCAET et qui facilite tellement les relations.
Quels sont les faits majeurs qui ont marqué l'industrie du tourisme ces 40 dernières années ?
Vincent Denizot : Deux grands bouleversements m'ont marqué. Le premier, c'est la digitalisation du monde du tourisme, qui a fait entrer des acteurs comme Booking.com ou Skyscanner, qui ne sont pas issus du tourisme traditionnel. Le deuxième, c'est l'arrivée des compagnies low cost, qui ont complètement rebattu les cartes. Elles ont modifié la façon de travailler des tour-opérateurs, avec moins de charters et plus de packages dynamiques.
Y a-t-il une personnalité inspirante dans le monde du tourisme qui vous a particulièrement marqué ?
Vincent Denizot : Oui, Hervé Viguier, l'ancien président de Marmara. C'était un visionnaire. Il a transformé Marmara en un tour-opérateur majeur avec plus d'un million de clients. Il avait une façon de penser disruptive et une grande rigueur financière. Il m'a beaucoup inspiré et m’impressionne aujourd’hui encore.
Qu'est-ce que l'ESCAET vous a apporté au démarrage de votre carrière ?
Vincent Denizot : L'ESCAET m'a donné un socle incroyable. En sortant de l'école, j'étais immédiatement référent dans l'agence où je travaillais, car j'avais une maîtrise des outils et une compréhension des enjeux très forte. Cela m'a permis de devenir responsable d'agence au bout de six mois seulement. L’ESCAET représentait un label tellement fort qu'à l'époque, il y avait peut-être un peu plus de difficultés d'insertion qu'aujourd'hui, mais avec un avec un label ESCAET, vous n'aviez aucune difficulté d'insertion.
Et dernier point, dans votre secteur, votre entreprise, quels sont les principaux enjeux actuels aujourd'hui ?
Vincent Denizot : Les enjeux sont de pérenniser un business model rentable dans un environnement tellement mouvant et tellement bousculant, qu'il faut en permanence s’adapter. On essaye donc aujourd'hui de développer notre part de marché dans le secteur, mais non plus en inondant d'offres le marché, comme on a pu le faire par le passé, mais en faisant une croissance rentable, en essayant d'orienter les ventes vers des canaux plus rentables pour l'entreprise. J’ai vraiment, à ce titre-là, un enjeu très important, celui de développer notre réseau d'agences de voyages, puisque c'est un canal à la fois fiable et rentable, de pouvoir contrôler notre distribution pour justement être pérenne face à l'avenir. Donc, l'enjeu, c’est celui de la pérennité, à travers les choix de distribution.